L’action du syndic en cas de désordres affectant les parties privatives
Principe
Selon l’article 15 de la loi du 10 juillet 1965, le syndicat représenté par son syndic, peut agir, conjointement ou non avec un ou plusieurs copropriétaires, en vue de la sauvegarde des droits afférents à l’immeuble.
Cette action peut concerner aussi bien des préjudices subis par le syndicat, sur les parties communes, que des préjudices subis par les copropriétaires, sur leurs parties privatives.
A une condition toutefois : le préjudice subi par les copropriétaires sur leurs parties privatives doit avoir sa source dans un désordre affectant les parties communes.
Le seul fait que les désordres qui affectent les parties privatives trouvent leur origine dans les parties communes ou soient indissociables de ces dernières, suffit à justifier la recevabilité de l’action syndicale, sans qu’il soit nécessaire qu’ils affectent l’ensemble des parties privatives. (3ème Chambre civile, 23 juin 2004 (Bull. n° 128)
Désormais, en exigeant simplement que les désordres trouvent leur origine dans les parties communes pour que l’action syndicale en réparation des dommages en parties privatives soit recevable, la Cour de cassation a estimé que cette seule condition était nécessaire et suffisante pour admettre la recevabilité de l’action syndicale en réparation des dommages affectant les parties privatives.
Si cette condition est réalisée, il n’est pas nécessaire que l’ensemble des lots privatifs soient affectés par le préjudice affectant les parties communes.
Il a été jugé que le syndicat des copropriétaires avait qualité pour agir en réparation des dommages ayant leur origine dans les parties communes et affectant les parties privatives d’un ou plusieurs lots. (Civ 3 23 juin 2004 03-10475)
En revanche, si les désordres n’affectent que des parties privatives sans trouver leur origine dans des parties communes, ils doivent affecter toutes les parties privatives de l’immeuble pour que le syndicat des copropriétaires ait qualité à agir.
C’est par exemple le cas de l’immeuble neuf dont les fenêtres des appartements désignées comme parties privatives dans le règlement de copropriété sont toutes fuyardes ou lorsque les désordres affectent toutes les robinetteries (Cass. civ. 3, 14 novembre 1990, n° 88-12.995 N° Lexbase : A4338A
Un arrêt du 28 Février 2018 a également retenu la responsabilité décennale du fournisseur, dès lors qu’il est établi qu’il a activement participé à la construction et en assumé la maitrise d’œuvre.
Un cas particulier : Les nuisances acoustiques
Sur la base des articles 1792 et suivants du code civil, en cas de nuisances acoustiques subies par l’ensemble des copropriétaires, les juges ont retenu qu’une gêne acoustique pouvait être collective, même si elle n’était pas ressentie de façon identique par tous les copropriétaires (CA Paris, 23ème ch., sect. B, 29 janvier 2009, n° 06/21543 N° Lexbase : A1961EDY).
Mais pour pouvoir faire jouer la garantie décennale des constructeurs, il faut que les défauts d’isolation acoustique rendent l’immeuble impropre à sa destination (Cass., 3ème civ., 20 fév. 1991, M. Serge Delaire, D. 1991, jurispr. p. 556, note R. Martin : R. D. Imm. 1991, p. 350).
Ainsi il a été jugé que le fait que les performances acoustiques entre les murs mitoyens soient inférieures de 4 dB par rapport à la réglementation en vigueur rend l’immeuble impropre à sa destination (C.A. Montpellier, 17 avr. 2014, Monsieur Antoine S., Juris-Data n° 011192).
Les juges apprécient parfois en dehors de ces normes légales, ou lorsque leur respect est assuré, si les désordres acoustiques ont une gravité suffisante pour rendre l’immeuble impropre à sa destination (Cass., ass. plén., 27 oct. 2006, M. X. , n° 05-19408 ; Cass., 3ème civ., 21 sept. 2011, Syndicat des copropriétaires Résidence Les Terrasses du Lac, n° 10- 22.721).
La responsabilité de l’entrepreneur a été retenue en raison notamment :
– d’un vice d’exécution, les bruits provoqués par l’ascenseur étant trop importants (C.A. Paris, 25 juin 1991, S.C.I. résidence Saint-Louis, préc.), sur le fondement de l’impropriété à destination ;
– d’un vice de conception, l’entreprise proposant le choix d’un système d’isolation phonique qui s’est révélé inefficace (Cass., 1ère civ., 16 juill. 1991, Cie AGP La Paternelle, n° 89-15.577, préc., sur le fondement du non-respect des normes minimales d’isolation acoustique) ;
– de l’omission de faire procéder aux vérifications acoustiques qu’imposait l’importance des transformations réalisées dans l’immeuble (Cass., 3ème civ., 16 déc. 1992, M. Jean Horodecki, n° 9114.025), dans le cadre d’une impropriété à la destination d’un hôtel qui avait été entièrement rénové par sa transformation en appartements, vendus en l’état futur d’achèvement ;
– du manquement à une obligation de conseil, l’entrepreneur n’ayant pas signalé au maître d’ouvrage les risques sonores présentés par les éléments d’équipement (C.A. Paris, 26 nov. 1997, Sté Soprema, Juris-Data n° 023392), s’agissant de système de ventilation dans un hôtel de grand luxe entièrement rénové.
Il est à noter également que, sur la base de l’ancien article 1147, aujourd’hui, l’article 1231-1, du code Civil, les désordres acoustiques peuvent aussi être le résultat, non d’une impropriété à la destination de l’immeuble, et/ou d’une inobservation des règles légales, mais d’un défaut de conformité aux stipulations contractuelles (Cass., 3ème civ., 10 oct. 2012, SNC Saint-Cloud Armengaud 15, n° 10-28309 ;
La responsabilité contractuelle du promoteur-vendeur peut alors être engagée en raison des désordres acoustiques provoqués, même si les normes règlementaires d’isolation acoustique ont été respectées.
C’est le cas lorsque ce promoteur-vendeur avait promis qu’une attention particulière serait portée à l’isolation acoustique du bâtiment dès lors que cette publicité avait déterminé l’engagement de l’acheteur (Cass., 3ème civ., 2 nov. 2011, SNC Saint Cloud Armengaud 15, n° 10-11999). Ne respectant pas cet engagement, le promoteur-vendeur a dû verser des dommages et intérêts à l’acheteur au titre des désordres et malfaçons (Cass., 3ème civ., 13 mai 1992, Sté Semaca, n° 90-17068).
Lorsque cette non-conformité était cachée à la réception du bâtiment, la responsabilité du vendeur pourra être invoquée au-delà du délai d’un an (Cass., 3ème civ., 13 nov. 2003, Sté Sogelym Steiner, n° 02-11739).
Ces non-conformités contractuelles peuvent également donner lieu à la résolution de la vente. Tel est le cas s’agissant d’une non-conformité de parties communes visant notamment les entrées d’un immeuble engendrant, dans un appartement, la perception des bruits de passages des occupants de tout l’immeuble (C.A. Chambéry, 14 sept. 1994, Syndicat des copropriétés résidences Arcs 2000 fonds blancs, Juris-Data n° 046155).
Les bruits créés par l’exploitation d’un local commercial au rez-de-chaussée de l’immeuble peuvent également être sources de nuisances sonores et olfactives importantes.
Les solutions sont les mêmes s’agissant des poussières et des odeurs.
On peut noter ainsi :
Après avoir constaté que les troubles de jouissance dont le syndicat des copropriétaires demandait réparation provenaient de l’émission de fumées, poussières et odeurs affectant tous les occupants des bâtiments constituant la résidence, une cour d’appel en a déduit, à bon droit, que l’action du syndicat était recevable. Cass. civ. 3ème 12 octobre1994, Rev. Loyers 1996, P. 24 :