Un problème récurrent en copropriété : Les fuites d’eau
1) Les premiers signes
Vous constatez par exemple l’apparition de cloques au plafond de votre appartement probablement dû à une fuite d’eau.
Renseignements pris auprès de votre voisin du dessus, ce dernier vous indique être lui-même victime d’infiltration…
Que faire ?
Ce type d’incident, pourtant classique, peut très vite devenir un casse-tête non seulement pour les victimes directes, mais aussi pour la copropriété
Aussi parait-il nécessaire de clarifier les droits et devoirs de chacun.
2) Les premiers gestes
Il est un préalable incontournable : déclarer le sinistre à son assureur, même si on estime ne pas en être à l’origine.
En effet, cette déclaration conditionne l’engagement d’un certain nombre d’actions.
Depuis l’entrée en vigueur, le 1er juin 2018, de la Convention inter-assurance IRSI (Indemnisation et Recours des Sinistres Immeubles), un seul expert, l’assureur gestionnaire du sinistre, intervient dans la prise en charge de la gestion du dossier d’indemnisation pour le compte de tous les assureurs concernés.
Et cet « assureur gestionnaire du sinistre », c’est l’assureur de l’occupant de l’habitation dans lequel un dégât des eaux est constaté, quel que soit son statut (locataire, occupant à titre gratuit, propriétaire).
C’est lui qui devra, notamment :
- organiser lui-même la recherche de responsabilités (fuite d’eau),
- déterminer l’assureur devant indemniser les dommages supérieurs à 1600€,
- encadrer les recours éventuels entre les assureurs.
3 ) Les premières constatations :
La convention IRSI fonctionne différemment selon le montant des dommages inventoriés par local sinistré :
- S’il est inférieur à 1600 € (tranche 1 de l’IRSI) : dans cette hypothèse, c’est l’assureur gestionnaire qui prend en charge l’intégralité des dommages matériels quelles que soient leur nature et leur responsabilité, ainsi que la recherche d’une fuite d’eau
En parallèle, il y a abandon des recours, à moins que le sinistre soit répétitif, imputable à une entreprise ou encore s’il a fait naître des dommages immatériels.
Dans ces deux derniers cas, l’expertise demeure obligatoire.
- S’il est compris entre 1601 € et 5000 € (tranche 2 de l’IRSI) : l’assureur gestionnaire a l’obligation de mandater un expert pour le compte commun des parties au sinistre, dont les conclusions sont opposables à tous les assureurs.
Seule une expertise judiciaire peut remettre en cause ses conclusions. L’assureur gestionnaire assure l’indemnisation du sinistre, qui sera ensuite répartie entre les différentes assurances impliquées en fonction d’un barème. Si plusieurs responsabilités sont établies,
une seule assiette de dommages est déterminée et les recours s’effectuent en parts égales envers les assureurs des responsables, sans solidarité entre eux.
En somme, chaque assureur est responsable de l’indemnisation de son assuré, quelle que soit sa qualité (propriétaire occupant, non occupant ou locataire).
L’assureur du copropriétaire occupant prendra en charge le sinistre provenant d’une partie privative, la copropriété sera responsable si l’équipement à l’origine du sinistre est à usage commun et l’assureur du locataire assumera les dommages dus à une fuite d’eau sur le mobilier de ce dernier.
Les délais d’expertise sont étroitement encadrés, de façon à ce que les sinistrés soient indemnisés au plus vite.
Ainsi, la première réunion d’expertise doit avoir lieu dans les 15 jours suivant la réception de l’ordre de mission par l’expert.
La remise de son rapport d’expertise doit intervenir au plus tard 45 jours après que l’expert a reçu son ordre de mission.
4) Les premières difficultés
Il peut arriver :
- Que l’un des assureurs ne soit pas partie à la Convention IRSI,
- Que l’une des victimes ne souhaite pas y avoir recours,
- Que l’une des personnes impliquées ne soit pas assurée
- Que le montant des dégâts (par local assuré) dépasse 5.000,00 € HT.
- Que l’origine du dommage se situe dans une infiltration par façades, murs enterrés ou bien des phénomènes de condensation ou d’humidité,
- Que malgré l’intervention du ou des experts désignés par l’assureur, ou par suite de l’inertie de l’un des intervenants (voisin refusant les accès, syndic manquant de diligence), la cause du sinistre reste indéterminée, ou contestée par l’un des parties.
Dans chacune de ces hypothèses, il est prudent de missionner un avocat qui va introduire une procédure visant à la désignation d’un expert judiciaire, et de faire une déclaration de sinistre à sa « protection juridique » en indiquant le nom de cet avocat afin de prise en charge des honoraires de ce dernier dans les limites bien sûr des barèmes que prévoient votre contrat.
5) Le recours à l’expert judiciaire
Devant un litige relativement technique il faut se poser dès le début la question de l’expertise judiciaire.
Après, il pourrait être trop tard…
En effet, la règle principale est énoncée par l’article 145 du Code de Procédure Civile:
« S’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé ».
Quand le juge décide d’une expertise, il rend une décision qui précise les points suivants:
- Expert désigné,
- Mission de l’expert,
- Montant de la consignation, (somme d’argent versée à titre d’avance),
- Délai dans lequel l’expert doit accomplir sa mission.
- Le juge décrit précisément les opérations que doit mener l’expert.
Il indique les éléments ou les faits sur lesquels l’expert doit se prononcer. Il peut par exemple lui demander de déterminer l’origine ou la cause des dégâts et qui en est responsable selon lui.
Mais attention : l’expert ne donne qu’un avis technique, il ne donne aucune appréciation juridique, ce qui est en revanche le rôle de l’avocat.