L’abandon de chantier : quelques précautions élémentaires pour éviter l’agravation
Des travaux qui prennent du retard et le maître d’ouvrage s’inquiète.
Une entreprise qui promet mais ne tient pas son engagement, qui répond de plus en plus tardivement, puis qui ne répond plus.
Pour le maître d’ouvrage, la tentation est grande de voir son chantier reprendre le plus rapidement possible et à n’importe quel prix.
C’est pourtant le moment d’avoir les bons réflexes pour éviter de voir la situation s’aggraver à son détriment, en risquant de devoir payer l’entreprise défaillante de son solde, voire de lui verser des dommages-intérêts.
On évitera donc de prendre la décision de faire reprendre les travaux par une autre entreprise sans autre formalité.
De même que l’on distinguera l’abandon de chantier de l’arrêt temporaire.
L’abandon du chantier est juridiquement caractérisé par une interruption injustifiée pour une durée anormalement longue.
Ainsi, si l’entreprise défaillante est incapable de justifier par de réels motifs l’interruption du chantier, comme un cas de force majeure, un événement extérieur imprévisible et irrésistible, un cas fortuit, des intempéries ou une période de congés, le maître de l’ouvrage pourra alors agir contre l’entrepreneur défaillant.
Première démarche nécessaire : la mise en demeure de l’entreprise défaillante
Il s’agit donc de mettre en demeure l’entrepreneur de reprendre les travaux :
- en dressant une liste des travaux non encore exécutés
- en fixant un délai déterminé pour la reprise du chantier (entre 8 et 15 jours)
- en rappelant la date précise de livraison telle qu’elle a été convenue (on vérifiera au passage la présence dans le contrat, de clauses de pénalités de retard : attention, elles ne sont pas automatiques !)
- en indiquant la suspension de tout paiement ou versement jusqu’à la reprise des travaux. On peut même aller, en utilisant l’article 1226 du Code Civil, menacer d’une résolution unilatérale du contrat. (A noter cependant que l’entreprise peut la contester devant le tribunal)
On le voit, cette mise en demeure, que chacun peut faire en théorie en adressant une lettre en recommandé avec accusé de réception, nécessite en réalité une certaine maîtrise technique, tant pour la rédaction que pour le contenu justifiant le recours à un avocat, lequel aura également le réflexe de vérifier si l’entreprise n’est pas en redressement ou en liquidation judiciaire.
Deuxième démarche conseillée : le procès-verbal d’abandon du chantier
Présent dès le stade de la notification de la mise en demeure, l’avocat pourra également se charger de faire établir un procès-verbal d’abandon du chantier par un huissier de justice, qui indiquera les travaux déjà exécutés, ceux qui ne sont pas terminés, signalant aussi l’absence de personnel et la présence ou non de matériel sur le chantier.
Ce procédé présente le double avantage d’éviter toute contestation sur la situation matérielle et technique, tant lors du contentieux existant, que pour l’avenir, en cas d’intervention ultérieure d’une autre entreprise.
Troisième démarche possible : la désignation d’un expert judiciaire
Votre avocat se chargera alors d’obtenir la désignation d’un expert judiciaire pour avoir une approche plus fine que celle d’un simple constat d’huissier, notamment, quant à l’identification des désordres et de leur coût réparatoire, approche nécessaire en cas de mobilisation de l’assurance dommages – ouvrage, (qui fera l’objet d’un autre article sur ce site).